Le Syndrome Neuro Algo Dystrophique

 

    Le syndrome Neuro Algo Dystrophique (NAD) aussi appelé Syndrome Douloureux Régional Complexe (SDRC) représente actuellement la seule vraie dernière complication qui préoccupe le chirurgien orthopédique traumatologiste. En effet si les autres complications sont devenues rares (Cf chapitres des complications), le syndrome NAD peut par exemple apparaître dans 40 % des fractures du poignet, opérées ou non.

    C’est une réaction neurologique réflexe par dérèglement du système nerveux involontaire. Neuro = neurologique, Algo = douleur, Dystrophique = raideur.


    Le syndrome NAD peut survenir:


-soit après traumatisme d’un membre après une entorse ou une fracture (opérée ou non),

-soit après une intervention chirurgicale programmée touchant une articulation.

-soit spontanément (capsulite rétractile de l’épaule par exemple).


    L’intervention chirurgicale n’est pas en soi la cause formelle du syndrome NAD, c’est le système neurologique inconscient du patient qui déclenche ce syndrome!

Le chirurgien n’est donc pas  responsable de cette complication.




SIGNES CLINIQUES & RADIOLOGIQUES


    Les signes ne sont pas tous présents au même moment mais sont étonnants par leur caractères inhabituels et démonstratifs: c’est un véritable appel au secours de votre organisme.


L’exemple typique est celui de la fracture du poignet (opérée ou non). Il apparait progressivement sous forme :


- d’une douleur importante inhabituelle non calmée par les antalgiques survenant en dehors de toute compression apparaissant sous plâtre ou lors de la rééducation,  cette douleur peut remonter jusqu'à l'épaule. (Syndrome Epaule-main)


- d’un oedème important sous la résine qui ne disparait pas même après l’avoir fendue


- d’une sensation d’étau,

- d’une sensation angoissante de régression dans les progrès accomplis particulièrement caractéristique,

- d’une raideur des articulations des doigts avec impossibilité de fermer complètement sa main absolument typique.


-une hyper-sudation (main moite), une disparition des plis cutanés dorsaux de la main (peau lisse et brillante, les rides disparaissent) , une coloration cutanée inhabituelle (remarquée par le patient et pas forcément par son entourage).


  Radiologiquement même si la fracture consolide normalement, il apparaît une déminéralisation ostéoporotique localisée non seulement au poignet mais également au niveau de la main voire de l’avant bras. Les signes radiologiques peuvent être retardés par rapport aux manifestations cliniques.


Autre exemple: après une prothèse de genou l’apparition d’une raideur avec impossibilité de fléchir ou d’étendre le genou malgré une rééducation bien conduite, voire une régression des progrès articulaires accomplis est tout aussi caractéristique d’un syndrome NAD.


    Tous ces signes sont suffisamment évocateurs dans un contexte post-traumatique ou post chirurgical pour se passer de la scintigraphie osseuse et commencer le traitement le plus tôt possible.




ORIGINE ET MÉCANISME


    Le syndrome NAD est déclenché par le traumatisme émotionnel que constitue soit la fracture dans un  contexte d’urgence, soit l’intervention chirurgicale par elle même.

Il suffit que la douleur post-opératoire soit plus intense que celle que vous vous attendiez à endurer pour le  déclencher .


    Votre cerveau alors sur-réagit par le biais du centre neurologique de l'émotion (les amygdales cérébrales). Il en résulte une réaction inappropriée: les amygdales cérébrales envoient un ordre direct au thalamus (tableau de commande électrique général du cerveau) sans en référer au cortex cérébral (centre de la conscience). Tout est alors amplifié (comme seule l’émotion peut le faire ): douleurs, raideurs, déminéralisation (qui sont naturelles lors d’une fracture) deviennent alors incontrôlables: c’est l’algo neuro dystrophie!  C’est le systême sympathique/parasympathique (responsable de la vitesse des battements du coeur, de la respiration, du transit intestinal, de la pousse des poils etc..  toutes ces fonctions sur lesquelles vous n'avez absolument aucun pouvoir), qui est déréglé et ceci dans votre membre blessé. Votre cortex cérébral ne peut alors prendre conscience que des effets négatifs physiques de cette réaction émotionnelle excessive et involontaire mais il est déjà trop tard le syndrome NAD s’est installé.


CAUSES FAVORISANTES


    Cette réaction émotionnelle négative peut être amplifiée par un contexte particulier:


- Deuil,  départ d’un être cher,

- Conflit familial, séparation, divorce.

- Soucis familiaux (santé, enfants, argent...)

- Émotivité sur-développée (fragilité émotionnelle, syndrome dépressif...)



TRAITEMENT


    L'évolution sans traitement du syndrome NAD n’est pas favorable pouvant entraîner un handicap permanent. Traité rapidement le syndrome NAD peut guérir ou laisser un minimum de séquelles.


    Le traitement repose sur :


    - la rééducation pour récupérer  la mobilité articulaire et lutter  contre la raideur. Elle est essentielle,

      - une re-minéralisation osseuse par injection de Calsyn (Calcitonine la mieux supportée), c’est logique car le syndrome NAD est décalcifiant. Ce traitement peut être spectaculaire si il est entrepris tôt d’où l’intérêt d’un diagnostique précoce. Passé 3 mois son inefficacité fait le chou gras de ses détracteurs. Les diphosphonates administrés en perfusion sont souvent mal tolérés et n’ont pas fait montre d’ efficacité particulière dans ma pratique.

    - la compréhension du ou des mécanismes causals du syndrome NAD est indispensable  à la guérison  ainsi que l’acceptation du temps nécessaire à son traitement.


    La guérison apparaît progressivement entre 3 mois et 1 an 1/2 variable selon les sujets.



CONCLUSION


    L’apparition d'une raideur inexplicable après déplâtrage malgré une rééducation bien conduite associée ou non à une douleur (étau) s’étendant hors du le siège initial de la lésion, par son caractère inhabituel dans un contexte post traumatique ou après une intervention programmée (dont les suites habituelles sont parfaitement connues par le chirurgien) doit nous faire évoquer en premier lieu un syndrome NAD et traité comme tel le plus rapidement possible. C’est un phénomène réflexe neurologique involontaire que le patient s’inflige à lui même. La compréhension de ce mécanisme et de sa cause favorisante est tout aussi capitale à la guérison que les séances de rééducation et l’hormonothérapie re-minéralisante.

Docteur Pierre MONNIER
Chirurgien Orthopédiste
Polyclinique de Deauville
Pôle de Santé de la Côte Fleurie
La Brêche du Bois R.D. 62
14113 CRICQUEBOEUF

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